Le grain

Publié le par Mademoiselle S

Voici presque six mois que j'ai une cicatrice en forme de croix sur l'épaule.
C'est en lisant un ouvrage sur le théâtre que j'ai compris. Florence Dupont y expliquait que même le passage au crime - Médée tuant ses enfants, Oedipe se crevant les yeux - n'est pas un phénomène psychologique, ne relève pas d'une volonté propre, même altérée. Ce néfas serait le point de culminance de l'emprise d'un destin, d'une folie, d'un démon, sur nous.

Il y a six mois, je me suis reveillée comme tous les matins avec le même grain de beauté sur le bras. Comme tous les grains de beauté de soleil du monde, il avait été petit, puis grand, et de plat il était devenu rond.  Alors je me suis levée, je suis allée chez une dermatologue et je l'ai fait enlevé. Parce qu'il allait grossir rapidement, que ce n'était pas esthétique un gros grain de beauté, même s'il ne présentait aucun danger, aucun. Alors je l'ai fait enlevé, et à la place d'un inesthétique grain de beauté, j'ai une très vilaine croix. 

Voilà, j'ai compris ce qu'était un néfas. J'ai fait ôter un grain, une poussière, un pointillé d'une chose dont je ne possède rien ou presque, la beauté. La folie quotidienne tient peut-être dans ces choses-là.

Mais voici aujourd'hui en marge et en creux de la cicatrice se profilent deux petits, plats, autres grains de beauté. Il faudrait téléphoner à Florence Dupont pour lui dire qu'il y a autre chose après le néfas.

Publié dans Carnet de Vie

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L
contente que tu sois de retour. tes mots m'ont manqué. ^^
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N
Ah, enfin une nouvelle note de ta part! (et, entre parenthèses, vive le RSS, sans qui j'aurais sans doute perdu à jamais l'adresse de tes Carnets de vie...)Au plaisir de continuer à te lire...
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